« Jean-Baptiste proclamait un baptême de conversion » (Mc 1, 4) : cette simple phrase de l’évangile du jour nous offre une table d’orientation d’où contempler toutes les lectures de la messe. La conversion (μετάνοια, metanoia) est un processus qui se déploie en deux mouvements corrélatifs pour permettre la rencontre entre Dieu et l’homme. Le Seigneur s’approche de son peuple et lui parle par la bouche de ses prophètes : voici Isaïe et Jean-Baptiste avec leurs messages si forts. Puis l’homme, en retour, se tourne vers Dieu, comme dans l’évangile où « toute la Judée, tous les habitants de Jérusalem se rendaient auprès de Jean-Baptiste » (Mc 1, 5). Saint Pierre nous y invite aussi en deuxième lecture : « Le Seigneur veut que tous parviennent à la conversion. » (2 P 3, 9)
Première lecture : « consolez mon peuple ! » (Is 40, 1-5.9-11)
Nouvelle époque, nouveau message : c’est la tonalité qui ressort du chapitre 40 du livre d’Isaïe, en opposition avec la page précédente qui prophétisait le désastre de l’Exil au roi Ézéchias : « Écoute la parole du Seigneur Sabaot ! Des jours viennent où tout ce qui est dans ton palais, tout ce qu’ont amassé tes pères jusqu’à ce jour, sera emporté à Babylone. » (Is 39, 5-6) Entre ces deux chapitres, la grande plaie s’est abattue sur Jérusalem, et la reconstruction a commencé dans les pleurs… Le temps est donc venu de rendre l’espoir au Peuple.
Voulant ouvrir cette nouvelle page de l’histoire, le livre d’Isaïe imagine la venue, à Jérusalem, d’un envoyé spécial de son Souverain – le Seigneur – pour lui annoncer ce qu’elle doit attendre au milieu des tribulations : la venue de Dieu lui-même (Is 40). Nous voyons le héraut divin rejoindre son poste et délivrer son message : « Monte sur une haute montagne, toi qui portes la bonne nouvelle à Sion. » (v. 9) Un détail du texte hébreu retient notre attention ; le nom que nous traduisons « héraut » est au féminin, ce qui laisse supposer qu’il s’agit de la ville de Jérusalem, souvent personnifiée dans cette partie du livre d’Isaïe : « Réveille-toi, réveille-toi, debout, Jérusalem ! » (Is 51, 17.) La ville sainte aurait ainsi la mission d’annoncer la bonne nouvelle au peuple (Sion) et aux autres villes (« Dis aux villes de Juda… » v. 9). On peut y voir une préfiguration de l’Église…
Le terme « bonne nouvelle » (εὐαγγέλιον, euanguelion) était assez commun dans l’Antiquité. Il désignait un événement marquant pour un royaume, par exemple une victoire militaire ou la naissance d’un héritier ; le souverain faisait proclamer publiquement la nouvelle, de ville en ville, par des émissaires autour desquels la population se rassemblait, émue d’apprendre la réalisation de ses espoirs de paix. Le Nouveau Testament lui donnera une portée toute particulière, puisqu’il s’agira d’annoncer le grand fait du Christ. Une proclamation qui deviendra universelle, comme le texte d’Isaïe en a déjà l’intuition : « Tout être de chair verra que la bouche du Seigneur a parlé. » (v. 5) Saint Jean écrira, comme en écho : « La Parole était la lumière véritable, qui éclaire tout homme. » (Jn 1, 9)
Après une longue histoire conflictuelle marquée par le péché, le châtiment et la mort spirituelle d’Israël, Dieu ne se contente pas de marques d’affection envoyées du Ciel, il se fait proche de son peuple encore meurtri pour le guérir : Il est le Bon Pasteur (« Tel un berger, il fait paître son troupeau », v. 11) qui a pardonné les fautes de son peuple (« Son crime est pardonné », v. 2). Il s’apprête à venir Lui-même, en personne, pour « porter ses brebis sur son cœur » : il faut donc lui « préparer la route » (40, 3-4). Il s’agira d’une nouvelle révélation de « la gloire du Seigneur » : l’écrivain sacré a sûrement en mémoire la description du retour de la Gloire au Temple de Jérusalem dans le livre d’Ézéchiel. Elle avait quitté le sanctuaire (Ez 10) à cause de l’idolâtrie, et elle devait revenir dans un nouveau Temple purifié (Ez 48), avec cette ultime conclusion du rouleau : « Le nom de la ville sera désormais : “Le Seigneur est là.” » (v. 35)
Ce message convient particulièrement pour l’Avent, où toute la liturgie nous prépare à la venue du Christ. Nous sommes tendus vers la venue du Seigneur de gloire comme les Hébreux, et nous répétons avec eux : « Voici le Seigneur Dieu qui vient avec puissance ! » Dans l’évangile, le rôle d’émissaire est tenu par Jean, qui baptise le peuple en vue de la venue de Jésus, le Fils de Dieu qui « baptisera dans l’Esprit Saint » (Mc 1, 8), et la gloire du Seigneur se manifestera à cette occasion. La toute première tradition chrétienne, se remémorant la figure de Jean-Baptiste, l’ermite du désert, a donc reconnu en lui la « voix de celui qui crie dans le désert », annoncée par Isaïe (Mc 1, 2 citant Ml 3, 1 et Is 40, 3 selon la version grecque).
Psaume : Justice et paix s’embrassent (Ps 85)
Le psaume choisi par la liturgie, qui est une grande supplication pour obtenir la faveur divine, épouse le mouvement spirituel d’Isaïe – dynamique de pardon pour la première partie : « Fais-nous revenir, Dieu, apaise ton ressentiment contre nous ! » (v. 5), puis description de la consolation dans la deuxième : « Ce que dit le Seigneur, c’est la paix pour son peuple. » (v. 9) Nous ne lisons aujourd’hui que cette dernière, où le psalmiste contemple déjà la présence du Seigneur, qui inaugurera l’ère messianique, telle que l’attendait le peuple juif, lorsque « la Gloire habitera notre terre » et qu’enfin disparaîtra le mal : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent. » (v. 11) Jean-Baptiste, le Précurseur, sera le héraut de cette ère nouvelle. Saint Jean-Paul II résume bien l’esprit de ce psaume :
« La vérité germe comme un printemps renouvelé, et la justice qui, pour la Bible, est aussi sainteté et salut, se penche, du haut du ciel, pour commencer son chemin au milieu de l’humanité. Toutes les vertus, auparavant expulsées de la terre à cause du péché, rentrent maintenant dans l’histoire et, se croisant, dessinent la carte d’un monde de paix. Miséricorde, vérité, justice et paix deviennent comme les quatre points cardinaux de cette géographie de l’esprit [1] . »
Comme Isaïe, le psalmiste imagine un chemin préparé par la Justice, c’est-à-dire la rectitude du juste, devant le Seigneur : « La justice marchera devant lui. » (v. 14) L’imaginaire antique fait ici référence aux grandes processions religieuses dans les villes comme Babylone, où les statues des divinités étaient portées le long des avenues et acclamées par la population en liesse, lors des grandes fêtes. Point d’idolâtrie dans ce psaume : l’idole païenne devient une vertu humaine et c’est le Seigneur qui mène la procession. Cette vision est pleinement réalisée dans l’évangile par Jean-Baptiste, lui-même champion de la justice et de la vérité dans un monde hostile, et dont Jésus dit : « Amen, je vous le dis, parmi ceux qui sont nés de la femme, personne ne s’est levé de plus grand que Jean le Baptiste. » (Mt 11, 11)
Évangile : Il proclamait un baptême de conversion (Mc 1, 1-8)
Les lectures précédentes ont déjà posé les thèmes principaux de l’évangile du jour (Mc 1) : la conversion, la Bonne Nouvelle, l’espoir du salut… Il suffit d’y ajouter le baptême en vue du pardon des péchés, comme le rite pratiqué par Jean qui en annonce un autre dans l’Esprit, pour obtenir un cadre complet, comme le fait le Catéchisme :
« Cet appel [à la conversion] est une partie essentielle de l’annonce du Royaume : “ Les temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est tout proche ; repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ” (Mc 1,15). Dans la prédication de l’Église cet appel s’adresse d’abord à ceux qui ne connaissent pas encore le Christ et son Évangile. Aussi, le Baptême est-il le lieu principal de la conversion première et fondamentale. C’est par la foi en la Bonne Nouvelle et par le Baptême (cf. Ac 2, 38) que l’on renonce au mal et qu’on acquiert le salut, c’est-à-dire la rémission de tous les péchés et le don de la vie nouvelle [2] . »
Tout au long de cette année liturgique B, nous allons lire l’évangile de Marc. La liturgie, ce dimanche, l’ouvre en sa toute première page. Le verset initial nous offre, en synthèse, tout le message et la structure de l’œuvre : « Commencement de la Bonne Nouvelle [εὐαγγέλιον, evangelion] de Jésus, Christ, le Fils de Dieu. » (Mc 1, 1) Saint Marc était probablement un disciple de Simon-Pierre ; il apparaît dans les Actes (Ac 12) et dans la Première Lettre de Pierre : « … ainsi que Marc, mon fils » (1 P 5, 13). Il a ainsi écouté, puis imité la catéchèse du prince des Apôtres à Rome. À la suite de Pierre, Marc veut donc annoncer l’extraordinaire événement, la « Bonne Nouvelle », qu’est la venue de Jésus et son œuvre de Salut, une bonne nouvelle promulguée non par un roi terrestre, mais par Dieu lui-même ; il veut inviter son lecteur à croire en son mystère : il est le Messie (« Christ ») et le Fils de Dieu. Tous ces éléments se trouvent dans le premier verset : la Bonne Nouvelle et les titres de Christ, puis de Fils de Dieu.
Pour cela, saint Marc procède en deux étapes qui suivent les deux titres précédents : il présente d’abord le ministère de Jésus en Galilée (guérisons, paraboles, etc.), qui manifeste sa messianité. Cette partie se conclut sur l’exclamation de Pierre : « Tu es le Christ. » (Mc 8, 29) Jésus est ainsi reconnu comme le Messie peu avant la Transfiguration, qui constitue le point d’orgue de cette étape. Puis Jésus accomplit sa grande montée vers Jérusalem, acclamé comme « Fils de David » (titre messianique) ; il s’en va vers le mystère de sa Passion, de sa mort et de sa Résurrection. Cette Passion, Il l’annonce par trois fois, mais les disciples n’entrent pas dans ce mystère. Au pied de la Croix, il reviendra à un centurion de s’exclamer : « Il était vraiment le Fils de Dieu ! » (Mc 15, 39.) La seconde partie peut s’achever, c’est le Fils qui ressuscite dans la nuit de Pâques.
À travers ces trois titres donnés à Jésus – Christ, Fils de David, Fils de Dieu – le lecteur de Marc est appelé à suivre un itinéraire de croissance dans la foi pour adhérer à cette « Bonne Nouvelle de Jésus, Christ, le Fils de Dieu ». Ce chemin pédagogique sera le nôtre pendant cette nouvelle année liturgique.
Observons que la première citation de ce petit évangile est intéressante : Marc l’attribue tout entière à Isaïe, mais, en fait, il s’agit de deux citations différentes, l’une de Zacharie : « Voici que je vais envoyer mon messager, pour qu’il fraye un chemin devant moi. Et soudain il entrera dans son sanctuaire, le Seigneur que vous cherchez ; et l’Ange de l’alliance que vous désirez, le voici qui vient ! » (Zc 3, 1.) Il s’agit du dernier chapitre de l’Ancien Testament. L’autre citation, celle de la voix qui crie dans le désert, est basée sur la version grecque d’Isaïe (lxx), puisque la version hébraïque insiste plutôt sur le fait de préparer le chemin du Seigneur dans le désert (Is 40, 3).
La description du Baptiste que nous offre saint Marc, en quatre volets, est complète selon l’histoire et la théologie :
– La venue de Jean et sa mission ont été prophétisées par les grandes voix de l’Ancienne Alliance (v. 2-3) : alors que la prophétie était éteinte depuis Zacharie, voici une nouvelle figure prophétique qui vient proclamer la Parole.
– Il bouleverse la vie sociale et religieuse de la Judée (v. 4-5), et cela n’est pas passé inaperçu car des auteurs non-chrétiens comme Flavius Josèphe nous mentionnent le personnage. Le baptême de conversion qu’il administre était relativement nouveau à son époque : il existait certes des cérémonies d’ablutions et de repentir, mais ce n’était que les non-juifs qui devaient se soumettre à un baptême unique dans la vie, en vue d’appartenir au Peuple élu (en plus de la circoncision, etc.). La prédication de Jean est donc forte, à la limite de la provocation pour la plupart des juifs de son époque qui se considéraient comme sauvés par la simple appartenance à Israël et le non-rejet de la Loi.
– Son accoutrement et sa nutrition (v. 6), qui frappent les foules par leur originalité, leur rappelaient aussi la figure d’Élie, en retraite au-delà du Jourdain et dépendant du Seigneur pour sa subsistance ; on assimilait généralement le mystérieux messager de Ml 3, 1 (citation précédente) avec Élie, qui devait revenir avant la fin ; le lieu choisi par le Baptiste évoque aussi les grands moments de passage dans l’histoire sainte (l’arrivée en Canaan de Josué, l’assomption d’Élie).
– Son message est clair (v. 7-8) : il s’assimile consciemment à la « voix » d’Isaïe, annonçant que le Sauveur vient. Pour bien marquer l’imagination des foules, il affirme n’être pas digne de faire envers lui le travail humble d’un esclave (délier la courroie des sandales du maître pour lui laver les pieds).
Lorsque le Sauveur lui-même commencera sa vie publique, il reprendra les thèmes de Jean en insistant sur la conversion du cœur, car l’époque des préparations est arrivée à son terme : « Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous et croyez à l’Évangile. » (Mc 1, 15)
Deuxième lecture : Le Seigneur ne tarde pas (2 P 3, 8-14)
Pendant plusieurs siècles, le peuple d’Israël a reçu d’Isaïe l’invitation à « préparer le chemin du Seigneur » ; au bord du Jourdain, à un moment crucial de l’histoire, a surgi Jean-Baptiste pour répéter la même exhortation. Aujourd’hui, alors que nous attendons encore la venue du Christ dans la gloire, il revient à saint Pierre de nous inviter à la vigilance : « Le jour du Seigneur viendra, comme un voleur. » (2 P 3, 10) Ce message est similaire à celui de la semaine dernière : l’Avent vécu comme l’attente de la Parousie.
La Parole de Dieu résonne ainsi dans notre église en nous faisant écouter la prédication avant, pendant et après la venue du Sauveur. Saint Pierre annonce « un ciel nouveau et une terre nouvelle » (v. 13), comme le prophète Isaïe (Is 65, 17) puis saint Jean (Ap 21, 1). Plongés dans les méandres de l’histoire, les chrétiens s’interrogent – que ce soit pendant les persécutions romaines, que vivaient les lecteurs de cette Épître, ou pendant les tribulations modernes : « Quand cela va-t-il enfin se produire ? L’attente n’est-elle pas trop longue, signe d’un abandon de Dieu ? » Face à nos perplexités, le prince des Apôtres tente de nous rassurer : « Le Seigneur ne tarde pas à tenir sa promesse… » (2 P 3, 9) Notre vie est tellement brève qu’elle ne nous offre pas un étalon suffisant, il faut contempler l’histoire depuis Dieu : « Un seul jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un seul jour. » (v. 8) On se rappelle le Psaume : « Car mille ans sont à tes yeux comme le jour d’hier qui passe, comme une veille dans la nuit. » (Ps 90, 4)
Toute la réflexion de Pierre tourne autour du « jour du Seigneur » : « ἡμέρα κυρίου, heméra Kyriou », qui correspond à l’expression hébraïque « יום יהוה, Yom Adonaï » qui est un thème prophétique classique depuis Amos (cf. Am 8, 9) jusqu’à Zacharie (cf. Zc 13, 2). C’est le moment attendu de la grande action purificatrice et rédemptrice du Seigneur, c’est-à-dire son retour en gloire (la Parousie). Il semble tarder, mais c’est une manifestation de la miséricorde, afin que « tous aient le temps de se convertir » (v. 9) ; cela nous invite à contempler l’histoire humaine comme un espace où se déploie la miséricorde divine.
Bien plus, les croyants peuvent « hâter l’avènement du jour de Dieu », par leurs prières et leurs bonnes œuvres : le Seigneur de l’histoire veut s’associer l’œuvre positive des hommes. Le Catéchisme nous décrit ainsi ce mystère :
« Déjà présent dans son Église, le Règne du Christ n’est cependant pas encore achevé avec puissance et grande gloire (Lc 21, 27) par l’avènement du Roi sur la terre. Ce Règne est encore attaqué par les puissances mauvaises (cf. 2 Th 2, 7) même si elles ont été déjà vaincues à la base par la Pâque du Christ. Jusqu’à ce que tout lui ait été soumis (cf. 1 Co 15, 28), jusqu’à l’heure où seront réalisés les nouveaux cieux et la nouvelle terre où la justice habite, l’Église en pèlerinage porte dans ses sacrements et ses institutions, qui relèvent de ce temps, la figure du siècle qui passe ; elle vit elle-même parmi les créatures qui gémissent présentement encore dans les douleurs de l’enfantement et attendent la manifestation des fils de Dieu. Pour cette raison, les chrétiens prient, surtout dans l’Eucharistie (cf. 1 Co 11, 26), pour hâter le retour du Christ (cf. 2 P 3, 11-12) en lui disant : “Viens, Seigneur” (1 Co 16,22 ; Ap 22, 17.20) [3] . »
Ce jour viendra par surprise (« comme un voleur ») ; plutôt qu’un grand changement, ce sera la fin de toute chose créée. Alors, un autre monde apparaîtra, comme saint Pierre nous l’explique : « Les cieux disparaîtront avec fracas, les éléments embrasés seront dissous. » (v. 10) Pour décrire ce bouleversement universel, il utilise par trois fois le verbe « λύω, luô » (celui de nos conjugaisons grecques du collège), qui signifie « délier, dissoudre », comme lorsque l’on renvoie une assemblée ou qu’un conglomérat d’éléments cesse d’être maintenu dans l’unité et se disperse. L’évangile du jour utilise ce verbe dans un sens très concret : « délier » les sandales du maître (Mc 1, 7). L’épître de Pierre l’emploie au figuré dans une dimension cosmique. C’est un élément classique de l’apocalyptique juive, emprunté à la culture babylonienne et perse, pour désigner la destruction finale qui attend le monde physique. De façon surprenante, saint Pierre lui ajoute l’aspect du feu : « éléments embrasés… cieux enflammés », qui désigne le jugement, car la flamme purifie le métal : « l’or périssable que l’on vérifie par le feu » (1 P 1, 7). Tout le monde créé est donc en attente d’une grande conflagration finale, et cette phrase qui précède notre passage explique bien la pensée de l’Apôtre sur ce point : « Les cieux et la terre d’à présent, la même parole les a mis de côté et en réserve pour le feu, en vue du jour du Jugement et de la ruine des hommes impies. » (2 P 3, 7)
Il faut donc attendre ce Jour « en vivant dans la sainteté et la piété » (v. 11), sans s’attacher à ce monde qui passe, et faire tout « pour qu’on vous trouve sans tache ni défaut » (v. 14) : un appel à la conversion, similaire à celui de Jean-Baptiste dans l’évangile.
Rassemblés en Église, nous sommes pèlerins sur terre : comme les habitants de Jérusalem, nous écoutons avec joie Isaïe qui annonce la « Bonne Nouvelle » de la venue du Seigneur ; nous allons au Jourdain pour nous convertir à l’appel de Jean-Baptiste ; nous reconnaissons le Messie, comme saint Pierre, et nous vivons spirituellement de ses dons. Nous attendons enfin son retour dans la gloire, comme la liturgie de l’Avent nous y invite :
« Car il est déjà venu, en prenant la condition des hommes, pour accomplir l’éternel dessein de ton amour et nous ouvrir le chemin du salut ; Il viendra de nouveau, revêtu de sa gloire, afin que nous possédions dans la pleine lumière les biens que tu nous as promis et que nous attendons en veillant dans la foi [4] . »